LINDA PARK ✸ lightning strikes the heart

Mots : 713
Elle ne fait pas partie de ces personnes qui se confient, qui se révèlent d'une facilité déconcertante. C'est même difficile de lui tirer les vers du nez, alors qu'elle préfère tirer un trait sur un passé qui l'a profondément marquée. Demandez-lui d'où elle vient et qui sont ses parents, et elle bafouera quelque chose d'inaudible avant de changer de sujet. Sa confiance, il faut réussir à la mériter. Et Dieu sait qu'elle ne la donne pas à n'importe qui. Peu sont ceux qui ont déjà tenté de briser la carapace qu'elle s'est construite bien des années auparavant, dans l'unique but de se protéger du monde extérieur. Vous voyez, être comme tout le monde, c'était bien plus facile que de confronter ses problèmes. Pas qu'elle ne l'ait pas déjà fait, mais à force de chercher une solution à ceux-ci, elle a su se brûler d'une force qui l'ait fait rebrousser le chemin. Elle s'est replié sur elle-même, et a ensuite toujours souhaité les fuir. Et maintenant, elle veut oublier. Ne pas se replonger dans ces douloureux souvenirs qui représentent sa douloureuse enfance. Il arrive parfois que ces derniers reviennent la hanter la nuit, lui provoquant soit des images bien trop horrifiantes pour être des rêves ou lui causant alors une insomnie sans pareille, dont elle ne peut remédier qu'au bout de quelques jours. Mais tout ceci, elle ne l'admettra jamais. Tout ceci, elle ne l'avouera pas, à personne. Elle préfère le cacher.

Elle préfère oublier. Parce qu'elle se souvient de sa souffrance comme si c'était hier. De chacune des sensations qui l'ont submergée tout le long, jusqu'à ce qu'elle ne décide - ou du moins qu'elle ne puisse - enfin se détacher de tout ce malheur. Elle se souvient sentir son cœur se serrer si fort qu'elle en suffoquait. De la douleur qu'il balançait à travers sa poitrine, à travers tout son être. Elle se souvient de ses joues humides et des larmes qui avaient mouillé son oreiller, lorsqu'elle enfouissait son visage en son sein pour laisser exploser ses émotions. Elle se souvenait de cette culpabilité qui l'a longtemps rongée. Du doigt de son paternel pointé vers elle, ce doigt accusateur qu'il lui lançait lorsqu'il avait bu le verre de trop. Puis elle se souvient d'une haine grandissante à son égard, qu'elle peinait à dissimuler derrière un visage contracté. Elle était partagée entre ce dégoût et les larmes qu'elle versait parce qu'elle ne supportait pas la disparition de la femme qu'elle aimait plus que tout au monde. De cette femme qu'elle admirait, et qui lui donnait un amour des plus attendrissants, caressant les cheveux de sa progéniture d'une douceur que Linda ne peut pas oublier, ne peut jamais oublier. Elle s'est longtemps sentie coupable de la mort de sa figure maternelle, de sa maman, puisque cet amour manquait également à son père. Alors elle s'est réfugié ailleurs. Elle a tenté de retrouver ce réconfort ailleurs. Dehors, certainement pas à la maison, où elle fréquentait tous ces adolescents idolâtrés par ceux qui se faisaient appeler intellos. Et elle devint l'un d'entre eux, se bâtissant ce nouveau visage souriant et toujours partant pour s'amuser. Ce visage, ce masque superficiel qu'elle continue encore de porter aujourd'hui. Si tous ces souvenirs sont aujourd'hui encore douloureux pour Linda, elle peut au moins toujours essayer d'apprendre à se reconstruire. Loin de tout ça, loin de son père et du mépris qu'elle lisait dans son regard, loin des paysages de sa ville natale qui lui rappelaient les moments passés avec sa mère. Des moments qu'elle chérissait certes, mais devenus bien trop douloureux à s'en souvenir depuis qu'elle était partie.

Linda, tu peux quand même être fière. Même si ta carapace continue de te tenir compagnie, tu deviens adulte, tu grandis, tu te reconstruis. Tu poursuis le job de tes rêves, étudiante dans la filière de ton choix et stagiaire sous la tutelle d'une femme que tu admires depuis plusieurs années. N'est-ce pas déjà une grande avancée ?